Extension du port : décideurs et écolos restent inconciliables
Article du Midi Libre - 1er février 2013
Deux camps s’opposent. Tous se définissent, pourtant, comme "progressistes", se veulent "visionnaires", préparant "l’avenir de nos enfants". Mais chacun à sa manière. Les porteurs du projet, ses défenseurs, invoquent "la globalisation", "l’ouverture", "le sens de l’histoire", et même "la faim dans le monde". Leurs contempteurs rappellent, eux, "les risques liés au trafic de produits dangereux", "l’importance des circuits courts", ou "la raréfaction programmée du pétrole…". Bref, on ne se comprend pas. Ou mal.
Depuis le 14 janvier dernier et l’ouverture du débat sur l’extension du port de La Nouvelle porté par la région (200 millions d’euros d’investissements publics), les réunions publiques se suivent et se ressemblent. Les élus du conseil régional, du département, du Grand Narbonne, les membres de la CCI, les décideurs du secteur, les syndicalistes, la CGT notamment, pour qui "le port ne sera jamais assez grand", dixit Robert Passemar, promeuvent ce plan de développement. Dans le même temps, EELV (Europe écologie Les Verts), des sympathisants écologistes, l’association présidée par Maryse Arditi, Eccla, ne lui reconnaissent que très peu de vertus : trop grand, trop cher, inadapté. Lundi soir, à Port-Vendres, lors de la troisième réunion publique, Jean Codognès (EELV), conseiller municipal à Perpignan, est même allé jusqu’à promettre l’annulation pure et simple de l’agrandissement de l’infrastructure devant la justice : "N’importe quelle association fera arrêter le chantier, au vu des quatre sites classés Seveso sur le port". L’élu rappelant au passage qu’entre 1995 et 2012, le trafic sur Port-La Nouvelle avait baissé de 33 % (de 3 à 1,9 million de tonnes), et doutant de l’intérêt d’un tel agrandissement. "L’offre portuaire a doublé en Méditerranée, alors que la demande s’est effondrée". Quant à Laurence Carretero, permacultrice à Sigean, extrêmement active depuis l’ouverture des débats, elle ne cesse d’évoquer, "les prévisions farfelues de la région en matière de trafic d’hydrocarbures", ou "le peu d’emplois créés eu égard à l’investissement pharaonique, un emploi pour 250 000 euros".
Un discours qui rejoint, en plusieurs points, celui d’Eccla et de Jacky Grau d’EELV. Agnès Langevine (EELV) parle, elle, de "vision magique", Albert Cormary (EELV) de "chantage aux travaux", entre autres. "Arrêter de vouloir vivre en autarcie" En face, Marc Chevallier, président du port de Sète, Michel Moly, président du port de Port-Vendres, Georges Jordan, directeur de Saint-Charles international, à Perpignan, conseiller du commerce extérieur de la France, Marcel Mateu, président du syndicat mixte gestionnaire de l’aéroport de Perpignan, ont, tous, vanté à Port-Vendres, les mérites "d’un plan structurant et porteur pour l’avenir". "Un projet créateur d’emplois", comme le martèle la CGT. "Une idée qui participera à nourrir l’Afrique, à lutter contre la faim dans le monde. Il faut s’ouvrir, arrêter de ne regarder que soi-même, arrêter avec les idées du siècle dernier, arrêter de vouloir vivre en autarcie. Ouvrons-nous au monde", a clamé le président de la Région, Christian Bourquin, la semaine dernière au Corum, à Montpellier. "Quel monde ?", lui répondront certainement ses détracteurs. Jean Codognès (EELV) prédit l’annulation du projet devant la justice. Pour Christian Bourquin : "ce projet participera à nourrir l’Afrique".